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Synthèses

Recueil Alexandries

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novembre 2004

Marion Boyer

Les persécutions spécifiques aux femmes, ouvrent-elles droit à une protection internationale ?

résumé

Le terme « violence contre les femmes » désigne tout acte de violence liée au genre (« sexo-spécifique ») entraînant des dommages corporels, sexuels ou psychologiques pour la femme, la jeune fille ou la fillette qui en est victime. Ce type de violence englobe les actes perpétrés contre une femme parce qu’elle est une femme et les actes dont les femmes sont plus fréquemment victimes que les hommes. Le droit international protège les femmes victimes de persécutions. De nombreuses associations ainsi que des lobbies se battent pour la reconnaissance des persécutions spécifiques aux femmes comme motifs d’octroi de l’asile ou pour une interprétation effective plus souple de l’article 1A2. Pendant longtemps la spécificité des violences faites aux femmes ne fut prise en compte à aucun moment dans le processus de demande d’asile en France. Les associations semblent prendre de plus en plus souvent en compte cette spécificité.

à propos

Note réalisée pour la formation DESS Administration du politique (Paris 1) : http://www.univ-paris1.fr/article27... L’université n’entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans ces documents.

citation

Marion Boyer, "Les persécutions spécifiques aux femmes, ouvrent-elles droit à une protection internationale ?", Recueil Alexandries, Collections Synthèses, novembre 2004, url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article324.html

108.5 ko

Des violences sexuées

→ Le terme « violence contre les femmes » désigne tout acte de violence liée au genre (« sexo-spécifique ») entraînant des dommages corporels, sexuels ou psychologiques pour la femme, la jeune fille ou la fillette qui en est victime. Ce type de violence englobe les actes perpétrés contre une femme parce qu’elle est une femme et les actes dont les femmes sont plus fréquemment victimes que les hommes. L’expression « violence contre les femmes » désigne notamment les actes suivants :

  • · les violences perpétrées au sein de la famille ou au foyer (violence domestique, viol conjugal, conditions de vie proches de l’esclavage, mariage forcé, crime dit d’honneur)
  • · les violences au sein du groupe social (prostitution forcée, travail forcé, excision)
  • · les violences commises ou approuvées par l’État (par exemple viol par des agents des pouvoirs publics, torture en détention, actes de violence perpétrés par des agents des services de l’immigration)
  • · les violences commises au cours d’un conflit armé, aussi bien par les forces régulières que par les membres de groupes armés (attaques contre la population civile, composée bien souvent en majorité de femmes et d’enfants, viols et autres violences sexuelles).

→ Les femmes sont victimes de violences en raison de leur sexe dans tous les pays du monde et dans toutes les couches sociales.

→ En temps de guerre les femmes sont des cibles particulièrement vulnérables de persécutions et de tortures diverses. Les stéréotypes relatifs au genre semblent accentués à la veille des conflits et pendant les hostilités. La femme, porteuse de l’honneur du groupe social, est alors une cible privilégiée. Toute attaque contre une femme du groupe ennemi est perçue comme une attaque contre ce groupe tout entier. Les femmes sont parfois prises pour cibles parce qu’elles portent en elles les générations futures

→ Les femmes sont victimes de violences émanant des Etats mais aussi et surtout émanant d’acteurs non étatiques.

→ Dans de nombreux pays certaines violences envers les femmes sont considérées comme légales ou « culturelles ».

→ Les demandeuses d’asiles, femmes et étrangères, sont victimes d’une double discrimination

Des persécutions reconnues au niveau international

Le droit international protège les femmes victimes de persécutions

→ Les grands textes condamnant les persécutions

  • Charte internationale des Droits de l’Homme (Déclaration universelle des Droits de l’Homme 1948 [1] + Pacte relatif aux droits civils et politiques [2] + Pacte relatif aux droits économiques sociaux et culturels)
  • Convention européenne des Droits de l’Homme[3] (CEDH) article 3 et 5
  • Statut de Rome[4] (instaure la CPI) reprend l’idée de « crime lié au genre ». Les viols, grossesses non souhaitées, stérilisation obligatoire, prostitution forcée, esclavage sexuel sont reconnus comme crime de guerre. Cette disposition implique l’insertion de ces nouveaux crimes dans les législations nationales

→ Les persécutions spécifiques aux femmes font l’objet de textes internationaux spécifiques :

  • CEDAW[5] (1979) est le texte de référence sur les femmes : 23 experts surveillent l’application de la Convention
  • Recommandation générale n°19 du Comité pour l’élimination des violences à l’égard des femmes. Le texte propose une définition de la violence fondée sur le sexe et recommande que les Etats parties à la CEDAW prennent des mesures appropriées et efficaces pour éliminer toutes formes de violences fondées sur le sexe, qu’elles soient privées ou publiques, et précise que la violence fondée sur le sexe peut violer des dispositions particulières de la Convention même si ces dispositions ne mentionnent pas directement la violence.
  • ● La recommandation n°19 est renforcée en 1993 par la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes [6] , Assemblée générale des Nations-Unies 1993. Cette déclaration donne une définition plus complète de la violence, traitant des préjudices physiques et psychologiques perpétrés dans des sphères publiques et privées et intentionnelles ou non. Cette déclaration stipule que les Etats devraient condamner la violence à l’égard des femmes et ne pas invoquer des considérations de coutumes, de traditions et de religion pour se soustraire à l’obligation de l’éliminer.
  • Protocole facultatif à la CEDAW [7] (2000) autorise un particulier ou un groupe de particuliers à présenter des communications au Comité si les violences sont commises par les gouvernements. Ceux-ci ne peuvent s’adresser au Comité que s’ils ont épuisé les voies de recours nationales et n’ont pas exercé d’autre recours international : en effet le Comité des Droits de l’Homme et la rapporteuse spéciale sur la violence à l’égard des femmes peuvent parfois être saisis de cas individuels). Seuls une vingtaine d’Etats l’ont ratifié.
  • Les femmes disposent d’un recours auprès du CAT pour les cas qui relèvent de la torture au sein de la Convention des Nations-Unies (Convention contre la Torture [8])

→ Plusieurs conférences sont tenues ayant pour objectif la mise en place de textes sur la prévention des violences

  • Conférence mondiale sur les Droits de l’Homme [9] entraîne la déclaration et le programme d’action de Vienne en 1993.
  • Pékin [10] (mais des articles sont jugés par certains pays contraires à leurs valeurs sociales et culturelles) et Pékin plus 5 en 1995 et 2000. Le texte liste 12 objectifs essentiels
  • Daphné I et II. Programme communautaire de lutte contre la violence exercée contre les enfants, les adolescents et les femmes.

L’asile, protection internationale.

Le droit d’asile est une forme de protection internationale.

Différentes formes de protection internationale :
Le droit international relatif aux droits humains oblige les États à respecter et à garantir les droits et la dignité de tous les êtres humains, en tout temps et sans la moindre discrimination. Cette obligation a longtemps été considérée comme s’appliquant aux relations entre l’État et les individus. Il est cependant admis, depuis peu, que l’État a également le devoir d’intervenir lorsque les actes de certains particuliers portent atteinte aux droits fondamentaux d’autres personnes. En période d’urgence et de conflit armé, les États peuvent, en cas de nécessité absolue, soumettre certains droits à des restrictions limitées dans la portée et dans le temps. Il existe toutefois des droits qui doivent être respectés en toutes circonstances. Il s’agit, entre autres, du droit à ne pas être tué arbitrairement et du droit à ne pas être soumis à la discrimination, à l’esclavage, à la torture ou à des mauvais traitements.
Le droit international relatif aux réfugiés protège les personnes ayant quitté leur pays pour fuir les atrocités de la guerre ou d’autres persécutions. Les personnes qui fuient leur région d’origine pour chercher un refuge sans franchir les frontières de leur pays, désignées sous le nom de « personnes déplacées à l’intérieur de leur pays », relèvent d’autres normes internationales, encore incomplètes.
Le droit international humanitaire ne s’applique qu’en cas de conflit armé. Il définit les comportements à adopter par les combattants et leurs chefs. De manière générale, il vise à limiter les moyens et les méthodes de guerre et à protéger les personnes ne prenant pas une part active aux combats.
Le droit international pénal définit les poursuites à engager et, le cas échéant, les sanctions à prendre contre les personnes accusées de crimes internationaux, et notamment de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide.

« Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays » art 14 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme.

→ La Convention de Genève [11] relative aux réfugiés (1951, entrée en vigueur en 1954) et son Protocole [12] (1966, entré en vigueur 1967) fournissent les bases légales de l’octroi d’asile

  • ●Article 33 : pose le principe de non exclusion, de non refoulement et d’obligation pour les Etats d’assurer une protection internationale à ceux qui en ont besoin.

Le principe de non refoulement dans le droit international relatif aux réfugiés interdit de renvoyer quelqu’un dans un territoire où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de son identité ou de ses croyances. Le principe de non refoulement dans le droit international relatif aux droits humains interdit plus généralement le refoulement si un individu risque de subir des atteintes graves à ses droits humains (not. la torture) Le principe de non refoulement est une norme de droit coutumier qui a donc force obligatoire pour tous les Etats.

  • ● Article 1A2 : définit le réfugié comme toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ».

- Dès juillet 1951 les Etats réalisent les limites de l’article 1A2. L’acte final de la conférence émet la recommandation suivante : « La conférence, Exprime l’espoir que la Convention relative au statut des réfugiés aura valeur d’exemple, en plus de sa portée contractuelle et qu’elle incitera tous les Etats à accorder dans toute la mesure du possible aux personnes se trouvant sur le territoire en tant que réfugiés et qui ne seraient pas couvertes par les dispositions de la Convention, le traitement prévue par cette Convention »

- Conférence de Nairobi (1985), 3ème conférence mondiale pour les femmes : le Comité exécutif de la Convention établit que les Etats dans l’exercice de leur souveraineté sont libres d’adopter l’interprétation selon laquelle les femmes en quête d’asile soumises à des traitements cruels ou inhumains pour avoir transgressé les coutumes de la communauté où elles vivent peuvent être considérées comme appartenant à un « groupe social »(1A2)

→ Les conclusions générales en matière de protection internationale adoptées en 1995 par le Comité exécutif de l’UNHCR sont adressées au Haut-Commissaire pour soutenir les actions des Etats dans le domaine du développement et de l’amélioration des critères et des lignes directrices sur les ripostes aux persécutions, surtout en ce qui concerne les femmes. La possibilité qu’à ces femmes soit reconnu le statut de réfugiées quand l’Etat d’appartenance des femmes ne veut pas ou ne peut pas garantir une protection adéquate, devrait ressortir dans ces lignes directrices.

Directive du Conseil européen 2001-2004 : prend en compte des agents de persécutions non étatiques (art 9). Cette prise en compte est en accord avec l’interprétation du HCR de la convention de Genève qui considère que les persécutions peuvent émaner d’un agent non étatique si l’Etat tolère ou refuse ou est incapable de trouver une protection à l’individu

Une protection efficace dépend de l’accès effectif des femmes aux procédures d’asile. Le problème de l’effectivité du respect des droits est dans les mains des Etats.

► Une reconnaissance complexe des « persécutions spécifiques aux femmes » au niveau national

Demandeuse d’asile, une inadaptation du système

Dans l’imagerie collective le demandeur d’asile reste un individu de sexe masculin. → La reconnaissance du droit d’asile est restreinte en Europe et le droit d’asile pour les femmes victimes de persécutions en raison de leur sexe n’est pas garanti dans la plupart des pays

La Convention de Genève, la CEDH (article 3 et 5) et la Convention contre la torture (article 3 et 1) ne donnent pas une définition unique du terme « persécution ». Ainsi le HCR conclut à l’inexistence d’une définition unanimement acceptée

→ Dans la majorité des Etats européens au moins un tiers des demandeurs d’asile sont des femmes mais les statistiques démontrent un taux moins élevé de reconnaissance du statut de réfugié par rapport aux hommes → Les interrogatoires menés par l’OFPRA ne prennent pas explicitement en compte les persécutions spécifiques aux femmes, le questionnaire de l’OFPRA récemment modifié non plus → Il est très difficile pour les femmes d’apporter la preuve de leurs craintes de persécutions, d’autant plus lorsque que celles-ci ne sont pas encore survenues.

L’interprétation du motif « groupe social »

La définition du réfugié selon l’article 1A2 de la Convention est « neutre » par rapport au sexe : elle ne prévoit pas les persécutions « spécifiques au genre », comme motif d’obtention du statut de réfugiée ; elle protège surtout les femmes lorsqu’elles se trouvent dans des situations de persécution semblables à celles où peuvent se trouver les hommes

Difficultés éprouvées par les responsables à établir :

  • une relation entre l’expérience de la persécution vécue par les femmes et les dispositions de la Convention de Genève (1951).
  • reconnaître la nature particulière ou spécifique des persécutions subies par les femmes (elles ont leur propre expérience de la persécution)

→ Problèmes d’interprétations divergentes de la part des Etats du motif de la persécution tenant à l’appartenance à un « certain groupe social » inscrit en 1 A 2 de la Convention de Genève

  • Recommandations du HCR :
  • Le HCR considère que dans le cas de persécutions faites aux femmes pour transgressions des coutumes de leurs communautés les femmes peuvent être vues comme un « groupe social »
  • Le HCR considère que les femmes victimes de violences sexuelles (viols, mutilations sexuelles, avortements contraints, stérilisations forcées) dans un pays qui ferme les yeux sur ces violences doivent pouvoir bénéficier du statut de réfugiée et ce même si l’application stricte de la Convention de 1951 ne le prévoit pas
  • Recommandation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (7 mars 2003) sur les meurtres dits d’honneur comme crimes et violences contre les femmes : veiller à ce que les services de l’immigration reconnaissent qu’une femme puisse obtenir le droit d’asile pour échapper à la violence

-  Dix pays ont intégré dans leur législation nationale en matière d’asile des dispositions offrant à des personnes qui ont fui des persécutions en raison de leurs préférences ou de leurs identité sexuelle la possibilité d’être reconnues comme réfugié Ex (1993) le Canada reconnaît l’existence d’une persécution propre liée au genre comme motif d’asile. Les décideurs doivent alors accepter deux définitions du groupe social pour les femmes a) les femmes en général forment un groupe lorsque qu’on nie l’existence d’un droit à l’ensemble des femmes b) un groupe de femmes peut être un sous-groupe victime d’une persécution spécifique

-  La France a récemment élargi son interprétation par jurisprudence ● Le cas Sissoko. Les femmes menacées d’excision au Mali forment un groupe social [13] ● Le cas « N » . Les femmes pakistanaises menacées de mariage forcé forment un groupe social. Ces avancées sont à nuancer dans la mesure où les jurisprudences ne valent que pour des pays, voire des régions et des cas très spécifiques

Définition de l’OFPRA du groupe social
« Un ensemble de personnes de mêmes origines, mode de vie ou statut social. Visant initialement les classes sociales dans les régimes communistes, cette notion de groupe social s’est depuis ouverte à d’autres catégories, qui revendiquent une façon d’être différente de celle prévalant dans leur société et qui encourent de ce fait des persécutions. Dans ce contexte, le recours à ce motif ne vaut que dans un pays donné et à un moment donné.
A cet égard, les persécutions subies ou à craindre peuvent émaner de tiers, d’autorités traditionnelles ou religieuses (exemple de l’excision au Mali), dès lors qu’elles sont ’’volontairement tolérées par les pouvoirs publics == du pays considéré.
Il convient toutefois de souligner que la notion n’est pas extensible à l’infini, et que seul un ensemble circonscrit et suffisamment identifiable de personnes pourra être considéré comme un groupe social au sens de la Convention de Genève »

- De nombreux freins semblent empêcher en France une interprétation extensive de la notion de « groupe social » dans le cas des persécutions spécifiques aux femmes :

  • ● La peur de faire de cette notion un motif « fourre tout »
  • ● La peur d’un afflux de demandes d’asile
  • ● La superposition et l’interdépendance entre les politiques de l’immigration et celles de l’asile : il en résulte que l’idée de protection individuelle inhérente à la Convention est reléguée à l’arrière plan.
  • ● La loi du 10 décembre 2003 modifiant la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d’asile institue une demande d’asile unique. La protection subsidiaire a pour objectif de compléter la convention de Genève qui ne couvre pas tous les besoins en matière d’asile. Elle s’applique en vertu de l’article 3 de la CEHD pour protéger les personnes menacées de « peine de mort » ; de « torture ou de peines ou traitements inhumains ou dégradants », de « menaces graves directes et individuelles » en raison d’un violence généralisée résultant d’un situation de conflit armé mais elle ne donne droit qu’à une carte de séjour d’un an De plus les personnes qui constituent une « menace pour l’ordre public » ne peuvent bénéficier de la protection subsidiaire, excluant ainsi les personnes accusées de « racolage actif ou passif », soit de nombreuses femmes étrangères victimes du système prostitutionnel

L’asile interne permet de refuser une demande d’asile au motif que la personne menacée a « la possibilité de mener une vie normale » dans une partie de son territoire d’origine. Les persécutions sexistes sont surtout collectives et non pas individuelles, ainsi, déplacer les femmes d’un endroit à l’autre dans le pays semble insuffisant pour les protéger des pressions ou des violences familiales/sociales

Perspectives :

→ De nombreuses associations ainsi que des lobbies se battent pour la reconnaissance des persécutions spécifiques aux femmes comme motifs d’octroi de l’asile ou pour une interprétation effective plus souple de l’article 1A2. Ex Préparation en cours d’un Livre blanc « Etrangères contre la double violence » par un comité d’action inter association. (Amnesty, Rajfire, LDH, CIMADE, Ligue des ligue des femmes iraniennes pour la démocratie…)

La spécificité des violences faites aux femmes n’est prise en compte à aucun moment dans le processus de demande d’asile en France. Les femmes ont beaucoup de difficultés à évoquer et à prouver les persécutions dont elles ont étés ou dont elles craignent d’être les victimes et ne semblent jamais sollicitées dans ce sens lors de leurs démarches de demande d’asile.

→ Les associations semblent prendre de plus en plus souvent en compte cette spécificité. Ex. La CIMADE ouvre en novembre 2004 une permanence dédiée aux femmes

Solutions politiques envisagées

→ Relier la persécution à la privation des droits humains fondamentaux : revendication de la CPI. Directive : « tout le monde sans discrimination à droit à la protection de la loi », cela permet donc d’éviter

  • la distinction entre la sphère privée et sphère publique.
  • une décision négative soit par principe de non ingérence / soit pour éviter l’argument de « l’impérialisme culturel »

→ Adopter une interprétation extensive de l’article 1A2 de la Convention de Genève.

→ Réunion des ministres féminines des affaires étrangères mars 2004. ( au moment de la réunion de travaux de la soixantième session de la Commission des Droits de l’Homme des Nations-Unies). Déclaration sur l’action commune à mener sur le genre :

  • changement significatif dans la reconnaissance des problèmes de la violence sexo-spécifique.
  • refus de tolérer toutes les formes de violences fondées sur le genre y compris les pratiques traditionnelles. Les facteurs socioculturels ou religieux ne peuvent justifier en aucun cas les abus contre les droits humains.
  • En appelle aux Etats pour que les déclarations dénonçant la violence envers les femmes se traduisent en actes.

Solutions juridiques envisagées

→ Dédier un texte aux violences spécifiques aux femmes qui aurait force de loi

→ Faire de la Déclaration sur l’élimination des violences à l’égard des femmes (de l’Assemblée générale des Nations-Unies) une convention.

→ Elargir le cadre de la Convention des Nations-Unies contre la torture.

→ Considérer l’expérience de violence vécue par les femmes comme une forme de persécution politique dans les cas où la persécution émane d’Etats ou de milieux sociaux culturels.

→ Inclure le « genre » dans les motifs de l’article 1A2 de la convention de Genève.

Marion BOYER
Novembre 2004


Notes :

    • [01]. Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 Adoptée par l’Assemblée générale dans sa résolution 217 A (III) du 10 décembre 1948
    • [02]. Pacte international relatif aux droits civiques et politiques Assemblée générale des Nations unies. Adopté par l’Assemblée générale dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966. Entrée en vigueur : le 23 mars 1976
    • [03]. Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, telle qu’amendée par le Protocole n° 11 Traité ouvert à la signature des Etats membres du Conseil de l’Europe. Rome 4 novembre 1950. Entrée en vigueur 3 septembre 1953
    • [04]. Statut de Rome de la Cour pénale internationale Fait à Rome ce 17 juillet 1998 Chapitres 1-3, Articles 1-33
    • [05]. Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) Adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l’adhésion par l’Assemblée générale dans sa résolution 34/180 du 18 décembre 1979. Entrée en vigueur : le 3 septembre 1981
    • [06]. Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes Résolution 48/104 de l’Assemblée générale du 20 décembre 1993
    • [07]. Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes Proclamé par l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies le 6 octobre 1999 [résolution A/RES/54/4]
    • [08]. Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants Adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l’adhésion par l’Assemblée générale dans sa résolution 39/46 du 10 décembre 1984. Entrée en vigueur : le 26 juin 1987, conformément aux dispositions de l’article 27 (1)
    • [09]. Conférence mondiale sur les Droits de l’homme (Vienne - 25 juin 1993) Déclaration et programme d’action de Vienne.
    • [10]. Quatrième conférence mondiale sur les femmes Beijing, 4-15 septembre 1995
    • [11]. Convention de Genève relative au statut des réfugiés Adoptée à Genève le 28 juillet 1951 par une conférence de plénipotentiaires sur le statut des réfugiés et des apatrides convoquée par l’Organisation des Nations Unies en application de la résolution 429 (V) de l’Assemblée générale en date du 14 décembre 1950. Entrée en vigueur : le 22 avril 1954, conformément aux dispositions de l’article 43
    • [12]. Protocole relatif au statut des réfugiés Dans sa résolution 1186 (XLI) du 18 novembre 1966, le Conseil économique et social a pris acte du Protocole avec approbation. Entrée en vigueur : le 4 octobre 1967, conformément aux dispositions de l’article VIII
    • [13]. Article 222-9 du Code pénal. La loi condamne et sanctionne toutes les pratiques de mutilation sexuelle féminine : excision du clitoris, infibulation ... La loi s’applique à toute personne vivant en France quelle que soit sa nationalité.

Sources :

Entretiens

Principaux : 7 entretiens in situ entre 1 et 2h30. 2 entretiens téléphoniques d’environ une heure.

  • Réseaux pour l’Autonomie des Femmes Immigrées et Réfugiées (RAJFIRE) - Ligue des Droits de l’Homme « Commission femmes » (LDH) - Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT) - CIMADE ( service oecuménique d’entraide) - Observatoire de l’égalité hommes/femmes de la Mairie de Paris - UNHCR - Commission de Recours des Réfugiés - Doctorante ENS-EHESS - Avocate pour la défense du droit des étrangers

Secondaires : 8 entretiens téléphoniques entre 10 et 30min et transmission de documentation.

  • Croix Rouge - Les femmes aussi - Association Nationale d’Assistance aux Frontières pour les Etrangers (ANAFE)- Amnesty international - France terre d’asile - Bureau du droit international et d’entraide judiciaire - Service du droit des femmes et de l’égalité, mission des affaires européennes et internationales.

Liens :

http://www.ladocfrancaise.gouv.fr/d... « Droit d’asile dans l’Union européenne ». § Les étapes de la politique européenne d’asile.

http://europa.eu.int/comm/justice_h... « Un régime d’asile européen qui tient compte des besoins spécifiques des femmes ».

http://www.euro.ucl.ac.be/publicati... « La protection internationale des réfugiés 1921-1998 » (JAEGER, Gilbert. Institut d’études européennes/UCL. Février 1999)

http://web.amnesty.org/library/inde... « Mettre fin à la violence contre les femmes : un combat pour aujourd’hui » (Londres, mars 2004). § « Le droit à la protection internationale »

http://web.amnesty.org/library/inde... « Pour que les droits deviennent réalité Les États ont le devoir de combattre la violence contre les femmes »

http://web.amnesty.org/library/inde... « Pour que les droits deviennent réalité : comment organiser votre campagne »

http://web.amnesty.org/library/inde... « Halte à la violence contre les femmes. Dixième anniversaire de la Convention de Belém do Pará : il est temps d’agir ! »

[->http://web.amnesty.org/librar... « Vies détruites, corps brisés : halte aux crimes commis contre les femmes lors des conflits armés »

http://www.amnesty.asso.fr/ « Mutilations génitales féminines (MGF) »

http://www.womenlobby.org/Document.... « Prise de position : l’intégration d’une perspective de genre dans la politique communautaire de l’immigration ». 18/2/2004 § La dimension de genre dans la politique d’immigration § Les demandeuses d’asile § La position du LEF

http://www.marchemondiale.org/fr/ch... « Charte mondiale des femmes dans l’humanité. (Seconde ébauche. Document de travail) »

http://www.marchemondiale.org/fr/ca... « Cahier des revendications mondiales. Liens entre les revendications de la Marche et le programme d’action de Beijing (septembre 1995) »

Bibliographie

Ouvrages

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S. BEAUD, "L’usage de l’entretien en sciences sociales", Politix, n°35, septembre 1996.
P. BOURDIEU, "La force du droit", Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n°64, septembre 1986.
Conseil de l’Europe, Recommandation 1450, Violence à l’encontre des femmes en Europe, adoptée le 3 avril 2000, Strasbourg.
B. GAITI, L. ISRAEL, "Sur l’engagement du droit dans la construction des causes", Politix, n°62, novembre 2002.
H. HIRATA, F. LABORIE, H. de DOARE, D. SENOTIER, Dictionnaire critique du féminisme, Paris, ed. PUF, 2000.
G. NOIRIEL, Etat, nation, immigration, Paris, ed. Belin, coll. Socio-histoires, 2001.
G. NOIRIEL, Réfugiés et sans-papiers, Paris, ed. Calmann-Lévy, 1991.
H. RENOUT, Institutions européennes, Paris, ed Paradigme publication universitaire, 2004.

Presse

A. CALLAMARD, "Les femmes à l’assaut du ciel", Le Monde Diplomatique, n°555, Juin 2000.
I. RAMONET, "Violences mâles", Le Monde Diplomatique, n°604, Juillet 2004.
S. ZAPPI, "la Commission de recours des réfugiés appelée a statué sur la pratique de l’excision", Le Monde, 18 novembre 2001, p 23.